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Entre Ciel et Terre

posted by on mai 21st, 2021

En route vers les étoiles…

Il aura fallu l’accident de Challenger, l’annulation du vol qu’il devait faire sur cette même navette, les adieux à ces camarades avec lesquels il s’était préparé à partir dans l’Espace, et 13 reports de tir pour qu’enfin, quarantaine achevée, Patrick Baudry et son nouvel équipage puissent monter dans ce sacré bus et qu’ils se rendent au pas de tir.
 

Ceux qui le suivent de loin en loin savent bien que personne ne l’a jamais vu aussi souriant que durant ces instants-là ! 39 ans, et pourtant un vrai petit garçon devant une vitrine contenant tous les plus beaux jouets dont il aurait rêvé et qu’il aurait pu avoir d’un seul coup. A cet instant, avançant sur le tarmac du bâtiment de la quarantaine au bus, coiffé de son béret un tantinet franchouillard, puis du bus à la navette, il était redevenu le petit garçon qu’il avait été, bien des années plus tôt, devant ce vélo qu’il avait dû attendre si longtemps avant que ses parents aient pu le lui acheter. Les sensations en plus ! Et côté sensations, il allait être gâté ! Il avait simplement appris de son père que, pour mieux les apprécier, les choses ont plus de prix quand elles sont longuement attendues, et, cela avait été largement le cas !

39 ans, quelques jours de plus, et, … 9 minutes plus tard, il volait, enfin, hors de cette atmosphère que l’on avait si longtemps crue infranchissable.

Le départ, couché, prisonnier du scaphandre, et, déjà, l’envie de témoigner. Un micro accroché aux lèvres dans le casque, les mots hachés par les vibrations titanesques, arrachés pourtant un à un à la conscience pour ne rien perdre des sensations et les partager, en temps réel… Puis, le professionnalisme, bien sûr, la rigueur militaire adoptée des années durant. Les premiers instants dans la navette, la Terre, sa planète admirée, neuve sous son regard. Et, sans plus attendre, la mise en état de la navette pour 7 jours entre Ciel et Terre pour 7 compagnons qui allaient vivre, ensemble, dans moins de 7 mètres carré.

Les expériences, le travail commun, les courtes pauses repas ( il faut dire que cela manquait de saucisson et de vin rouge !), les expériences à faire, le travail encore en lançant 3 satellites dans l’Espace, 1 ou 2 réparations de la navette. Patrick apprenait là que, finalement, voler dans l’Espace dans les années 80 était une routine bien rôdée. Mais, là, c’est lui qui volait. Pas ses camarades qu’il avait vu partir avant lui en Russie, ou même aux USA, et cette expérience, il pourrait, à son retour, véritablement la partager avec eux. Savoir, vivre, comprendre et, …restituer pour ceux qui n’y étaient pas allés et qui n’auraient jamais cette chance folle qu’il vivait là. Pas comme ce pauvre qui, pour avoir un peu trop bu et avoir été un peu trop démonstratif avec l’un de nos dirigeants français de l’époque, serait interdit de vol par les communistes (KGB).

Son plaisir ne fut pas boudé pour autant. Il savoura chaque petite minute dont il pouvait disposer. Dans le silence de la nuit factice, recréée comme sur Terre, Patrick « se relevait », ou plutôt, décrochait une main ou un pied d’un tiroir, et volait au hublot. Là, photographiant ou admirant, il reconnaissait sa géographie patiemment apprise à l’école, mais cette fois, « en vrai ». Quelques moments volés au temps pendant les 8 heures de sommeil tout à fait arbitraires puisque le soleil se levait et se couchait 16 fois par jour, écoutant dans son walk-man Supertramp et prenant tout ce qu’il pouvait ramener avec lui, l’aventure finie, de souvenirs et de sensations.

7 jours de pur plaisir à voler mieux que toutes ces fois où il avait pris son avion, un avion, qui, quel qu’il ait pu être, avait toujours été poussé à ses limites. Cette fois ci, c’était un autre vol, doux, pur, calme, serein. Mais tous les rêves ont une fin. Les 7 jours avaient vraiment passé trop vite. Il y avait bien eu quelques petits problèmes techniques miraculeux, prolongeant, par miracle, ce voyage fabuleux. Et, le retour ne se ferait donc pas à Houston, mais à Edwards en Californie. Cela avait un peu rallongé la chance ! Remise en ordre de la navette, contact retour avec la Terre, mise en place de la navette sur son orbite de retour, désorbitation, black-out et 9 minutes à l’envers pour revenir, traversant le feu brûlant, vers cette planète terre-planète mère, qu’il considérait désormais, comme Tiolkovski, comme son berceau. Mais, comme l’avait si bien noté ce savant – sans être allé dans l’Espace – qui peut vraiment avoir envie de passer sa vie dans son berceau ? Patrick Baudry n’a pas eu la chance de revoler. La France, dans ce domaine est un pays pauvre – elle doit payer ses vols n’ayant pas ses moyens propres pour envoyer un homme dans l’Espace – et, à l’époque en tout cas, un pays sincère : un homme qui a volé revole rarement. Les places sont chères et d’autres le méritent tout autant.

Pourtant, l’aventure ne s’arrête pas là. Premier à récupérer dans la navette redevenue un simple avion parmi les médecins montés à bord, vif à la descente de l’échelle, et, déjà, plein de projets. Dans un enthousiasme contagieux, il avait décidé que la France, elle aussi, pouvait voler de ses propres ailes, dans… l’Espace. Et, qui pouvait,mieux que lui, piloter un bel avion spatial européen qui continuerait ce que tous ses amis russes et américains avaient si bien entamé avant lui ? Patrick Baudry était forcément candidat. Plus que candidat, il était acteur de ce projet et allait tenter tout ce qui était en son pouvoir pour se donner les moyens de ses rêves coûteux, mais, ambitieux.